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5 mai 2011 4 05 /05 /mai /2011 14:37

 

2011-Foot_by_Astarpam.jpg

 

Christophe Dugarry livre cette anecdote sur la Coupe du monde 1998 dans une interview au Parisien  :

 

« On était en train de prendre des photos avec la Coupe du monde, entre nous. Et Lilian [Thuram] dit : "Allez les Blacks, on fait une photo tous ensemble". Moi, je n'ai pas relevé, je n'ai pas fait l'amalgame, je n'ai pas mal interprété ses propos. Franck Leboeuf, lui, a remarqué et a lancé : "Lilian, qu'est-ce que tu dis ? Et si, moi, je disais : allez les Blancs, on fait une photo tous ensemble ?". Mais à aucun moment on s'est dit que Lilian était raciste. Lilian ne doit pas oublier qu'il arrive à tout le monde de dire des choses qui dépassent sa pensée ou qui peuvent être mal interprétées. »

 

Evidemment, la comparaison de Dugarry ne tient pas.

Ce ne sont pas des propos de vestiaires qui sont reprochés à Laurent Blanc aujourd'hui.

Le sélectionneur de l'équipe de France de football est mis en cause pour sa participation supposée à la mise en place d'une politique officielle bien que secrète de discrimination.

Ce qui est très différent du simple fait de "de dire des choses qui dépassent sa pensée ou qui peuvent être mal interprétées". Certes, cela "arrive à tout le monde". L'important, justement, est d'en rester au stade de la parole... sans passer à l'acte, et surtout pas dans le cadre de responsabilités publiques et officielles.

 

Cela étant, si elle est authentique, l'anecdote de Dugarry est intéressante.

Dugarry prétend que Thuram voulait immortaliser l'image des seuls Champions du monde noirs, à l'écart du reste du groupe.

Si la scène s'est réellement passée, elle met le doigt sur la mentalité d'un homme en particulier - Thuram - et sur la présence d'un état d'esprit particulier dans l'équipe de France de l'époque. Equipe qui a notamment marqué la carrière et la vie de Laurent Blanc, qui a conquis avec elle son titre de Champion du monde.

 

L'état d'esprit qui a pu animer Lilian Thuram à une époque de sa vie est impénétrable.

En revanche, nous avons tous en tête le slogan partagé à l'époque - et aujourd'hui encore - par l'ensemble de l'opinion : nous regardions l'EDF, et nous voyions... des "Blacks", des "Blancs", des "Beurs".

 

Certes réunis par de sympathiques traits d'union : l'équipe "black-blanc-beur", l'a-t-on baptisée.

Il n'empêche que la formule grave dans le marbre cette différence-là, celle de la couleur de peau.

 

Ouvrons d'abord

((((((une parenthèse pour rappeler que cette différence est relative et pas des plus passionnantes.

Ce qui se voit sur la peau est loin de raconter toute l'histoire et la généalogie d'une personne.

Et puis sur le terrain, il peut y avoir des complémentarités plus importantes : petits/grands gabarits, offensifs/défensifs, perso/collectif... Quand on s'intéresse au sport, ces critères-là aussi peuvent servir à décrire les qualités et l'alchimie d'un groupe de joueurs. Il faudrait réfléchir un peu pour les résumer dans un "gros titre" accrocheur, mais je suis sûre que c'est faisable.

fin de la parenthèse)))))

 

L'inconvénient majeur d'avoir fait de la réunion entre "blacks", "blancs" et "beurs" la marque de fabrique de France 98, c'est bien sûr le côté double tranchant.

Un beau jour de juillet, "tout le monde" (comme dit Dugarry) en fait un symbole de fraternité : on est tous différents, et pourtant on s'aime !

Mais quand certains termes de l'équation sont séparés des autres, ça peut résonner bizarrement. Or à en croire Dugarry, c'est tout simplement cela qui se passe dans la tête de nos Champions du monde. Thuram comme Blanc.

Ils regardent le terrain. Ils pensent blacks, ils pensent blancs, ils pensent beurs. Trois catégories de joueurs, comme au bon vieux temps rappelez-vous !

Puisque ces différences viennent naturellement dans la bouche de "tout le monde" en France, comment les empêcher de sauter aux yeux des professionnels du ballon rond ? Jusque-là tout va bien... Jusqu'à ce que, de fil en aiguille, ils finissent par mettre un filtre méchamment tricolore sur tout ce qui concerne le foot français.

Thuram, selon Dugarry, dans les vestiaires : cet événement "privé" ressemble à l'expression d'une fierté communautaire menant à l'exclusion de joueurs qu'on croyait pourtant solidaire de la victoire.

La DTN au quasi-complet, selon Mediapart  : là, la discrimination tacite serait "légalisée" à cause de différences artificielles érigées en critères de gestion.

 

C'est inexcusable. C'est une raison de plus, c'est l'ultime raison qui devrait nous empêcher de recycler encore et toujours le mythe de l'EDF "blackblancbeur".

A force de jouer avec les pots de couleurs, nous risquons tous de finir comme Laurent Blanc et consorts : éclatés au sol, après une très vilaine glissade dans de prétendues "différences raciales".

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