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8 janvier 2015 4 08 /01 /janvier /2015 10:32

bombe.jpgSivens, 25 octobre 2014 : un "engagement massif et violent des CRS (...), alors qu'il ne restait rien à protéger"

(Louise Fessard, Mediapart, 4 novembre 2014).

Un mort.

Les polémiques se déchaînent.

 

Certains mettent en cause la responsabilité (ou plutôt l'irresponsabilité) du jeune Rémi Fraisse qui participait à un affrontement avec les forces de l'ordre.Ses proches expliquent l'enchaînement des circonstances dans ce témoignage publié par Reporterre .

D'autres s'interrogent sur le caractère disproportionné du dispositif déployé dans la "guerre"qui oppose depuis de longs mois, pour schématiser, les pouvoirs publics à ceux qui contestent la pertinence et la légalité d'un projet de barrage. Toujours dans  Mediapart (6 novembre 2014), Michel Deléan écrit : "Des grenades offensives (OF) de ce type, la plupart des gendarmes mobiles avouent ne jamais en avoir lancé. Ce sont des armes de guerre, que seul un gradé peut projeter, et encore : dans certains cas bien précis, et seulement en les jetant à terre, prévoit le règlement. Mais cette nuit du 25 au 26 octobre, dans la forêt de Sivens, environ 40 grenades de type OF sont lancées par les militaires, sur un total de plusieurs centaines d’engins divers utilisés."

 

Paris, 7 janvier 2015 : une protection policière qui ne parvient pas à empêcher deux terroristes de pénétrer dans la rédaction de Charlie Hebdo.

Douze morts.

Aucune polémique.

 

Parce que là c'est la communauté nationale dans son entier qui est frappée. Frappée au coeur. La raison attendra un autre jour pour qu'un débat s'ouvre sur ces quelques éléments :

D'une part, "il y avait en permanence des forces de police pour surveiller les lieux jusqu'en septembre dernier" selon un témoignage recueilli par Violaine Jaussent (Francetvinfo.fr, 7 janvier 2015) 

Et de l'autre ce jour-là, le dispositif est tel que "deux hommes cagoulés et armés" peuvent, écrit Patricia Tourancheau dans Libération, se balader relativement tranquillement aux alentours immédiats de leur cible : "ils «se trompent de porte et cherchent Charlie Hebdo»", puis se font ouvrir la porte par une collaboratrice du journal qu'ils obligent à taper le code pour eux.

 

Loin de moi l'idée de laisser entendre que les services de sécurité et de renseignement auraient fauté. Auraient mal fait leur boulot face à cet attentat. Je ne le crois pas.

Si je mets en rapport ces deux événements, c'est parce que je crois simplement que ces services font ce qu'ils peuvent avec ce qu'ils ont. Et "ce qu'ils ont" - beaucoup (trop ?) à Sivens, peut-être trop peu à Charlie Hebdo - c'est politique.

Purement politique.

 

Deuil national oblige, il est indécent de parler de cela aujourd'hui. Trop tôt. Pas la question.

Eh bien pour moi, si, c'est la question.

 

Il en était question par exemple pas plus tard que dans le Canard enchaîné du 30 décembre dernier, page 3, dans l'article intitulé "La dernière balade d'un danger public" de Didier Hassoux. Le journaliste raconte qu'un homme fiché "comme un type dangereux, susceptible de commettre un attentat" et qui par conséquent "aurait dû être surveillé de très près" venait de se jeter sous un train à l'insu des services de renseignement. D'où cet aveu qui a forcément une résonnance terrible avec les circonstances tout juste évoquées de l'attentat du 7 janvier : "Il faut de 10 à 12 personnes pour surveiller un suspect 24 heures sur 24. Or nous manquons d'hommes et de financement", expliquait la sénatrice Nathalie Goulet spécialiste de la lutte contre les réseaux djihadistes.

 

Alors les terroristes de Charlie Hebdo : l'étaient-ils, suspects ? Font-ils partie de ces individus que l'État a la volonté... Mais pas les moyens de surveiller assez efficacement pour les empêcher de passer à l'acte ?

 

En tout cas, il n'a pas fallu 24 heures à la police pour identifier les coupables présumés.

En tout cas, l'un d'eux au moins avait un passé d'aspirant terroriste qui avait déjà fait couler de l'encre : voir cette histoire exhumée par P. Tourancheau encore, encore dans Libération, en 2005...

 

Donc suspects, je ne sais pas. Mais visiblement pas sortis de nulle part.

 

Alors quand je lis le genre d'activités de très très basse politique à laquelle les forces de l'ordre doivent se consacrer par ailleurs...

Toujours en lien avec les mobilisations écologistes actuelles, il y a par exemple ce témoignage d'un homme empêché d'aller manifester par l'intervention de policiers en civil. "Fouillé de force", il a été déféré au tribunal pour avoir  transporté un couteau à huîtres qu'il dit avoir "oublié" dans son sac.

 

"Terroriser les terroristes", disait Charles Pasqua.

Beau programme.

Mais si l'État n'a pas les moyens, il devrait peut-être cibler le "terroriste" avec un souci plus clairvoyant de l'intérêt général.


libertc3a9-d-expression.jpg"L'ennemi intérieur" contre lequel la France mobilise sa force publique et sa propagande, ce ne peut pas être des gens qui n'ont tué personne et qui se battent aussi pour obliger l'État à respecter la légalité... comme le rappelle cet inventaire des conflits d'intérêts et petits arrangements entre amis qui entourent le projet de Sivens - entre autres dossiers douteux.

"L'ennemi intérieur", il y en a un aujourd'hui. Un seul. Et il vient de commettre un crime contre la liberté d'expression.

 

La liberté d'expression, oui. Laisser s'exprimer les gens avec qui on est pas d'accord, tout ça.

Très politique, la liberté d'expression.

Alors ce qui serait beau, de la part de l'État, c'est qu'il réponde aux auteurs de l'attentat contre Charlie Hebdo sur ce terrain. Ils ont peur de la liberté d'expression ? Soutenons-la.

 

Ce pourrait être un geste pour Le Monde diplomatique qui vient de se faire sucrer ses aides tandis que Closer et autres Télé Z se gavent.

Ce pourrait être un geste pour Acrimed dont le travail de critique des médias demeure, aux yeux de l'administration (fiscale), trop "militant" pour être vraiment "d'intérêt général" ...

Il y a beaucoup à faire, vraiment. Les médias alternatifs, en particulier, ont besoin de la mobilisation de tous pour continuer de nous éclairer. Et l'État, on le voit, a un rôle à jouer pour les empêcher de crever pour de bêtes histoires de porte-monnaie.

 

En mémoire des victimes de Charlie Hebdo, je souhaite que le Gouvernement s'engage dans ce combat pour le pluralisme et la liberté d'expression.

En mémoire des victimes de Charlie Hebdo, je souhaite aussi que le Gouvernement comprenne qu'il ne faudra plus se tromper d'ennemi désormais.

 

J'ai d'énormes réserves sur la ligne éditoriale de ce journal. Mais ils ne sont pas les derniers à se préoccuper de l'écologie. Et même si je ne les lisais plus depuis longtemps, je pense qu'ils ne sont ou n'auraient pas été (pour les défunts) forcément très chauds à l'idée qu'un attentat à leur encontre puisse devenir le prétexte à un durcissement des lois sécuritaires.

On n'a pas besoin d'être davantage fliqués. On veut être bien fliqués et pour une bonne cause.

Et ça, Mesdames et Messieurs les politiques, je souhaite qu'une belle et saine polémique vous le rappelle très prochainement.

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30 mars 2012 5 30 /03 /mars /2012 12:05

Dans la tour de Babel

Où s'agitent les nains

Je frémis, tout d'un coup

En pensant à demain.

 

C'est l'entrée en fonction

D'un homme peu commun,

Certains disent qu'il est fou

Et d'autres : inhumain.

 

Mais la masse réclame

Qu'il balaie nos classiques ;

 

Moi j'appartiens au monde ancien

Et ma vie part à la poubelle.

(Dans la perspective de mai 2012)

© Astarpam, mars 2012

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14 septembre 2010 2 14 /09 /septembre /2010 00:27

Il emménageait au Château avec une jolie petite famille.Peau de B...

Pas de chance : sa femme le laisse tout seul.

 

Il avait trouvé une remplaçante de caractère pour faire bien sur les photos.

Pas de chance : elle se transforme en potiche soumise.

 

Il voulait apprendre au pays à aimer la richesse (et les riches!).

Pas de chance : tombe la crise qui le force à parler de pauvreté.

 

Il était enfin prêt à construire "sa" grande réforme.

Pas de chance : son fossoyeur de la retraite meurt étouffé sous une montagne de fric.

 

Cinq ans de gâchés : c'est la faute à pas de chance.

 

... Et vous pensez aussi à ces lois qu'il tricote pour essayer de nous faire plaisir ?

Mais oui : c'est encore et toujours la faute à pas de chance, si les forces obscures du réel les rendent irréalisables. Ou illégales ?

Parce que s'il fallait prévoir les embêtements à venir pour gouverner, le job deviendrait vraiment trop embêtant. Gouverner, c'est promettre. Et ça, pas de chance, il sait très bien faire...

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7 août 2010 6 07 /08 /août /2010 13:32

DRVous dites "Vacances" ? Je pense "Bagnoles"... etc.

Neuves ou en voie d'extinction, pimpantes ou délabrées, vitres teintés ou racommodées au scotch, abandonnées en pleine rue ou surchargées au beau milieu du trafic : j'aime regarder les voitures.

J'admire d'abord le chassis. Puis mes yeux descendent chercher la plaque d'immatriculation. Parce que je suis curieuse et que le numéro de département d'une immatriculation peut être aussi surprenant, exotique, informatif que le reste de l'aspect extérieur d'une voiture.

 

C'est de moins en moins le cas, forcément, avec les nouvelles normes qui grignotent le paysage.

Il paraît pourtant que le numéro de département n'a pas disparu, en fait ! Mais je suppose que le piéton "moyen" ne le voit pas plus que moi. La plaque, j'y jette un oeil, je ne vais pas jusqu'à scruter son intimité. Le numéro de département, devenu invisible à l'oeil nu, ne sert donc au final que de très mauvaises causes.

 

Ce sont les pouvoirs publics qui ont vicié la signification de ce signe en permettant, dans un geste faussement généreux, de choisir un numéro de département à faire figurer sur la plaque. C'est artificiel puisque ce numéro ne fait plus partie des données d'identification du véhicule. Le ministère de l'Intérieur, qui a été contraint de faire cette concession pour apaiser la colère populaire, la présente donc comme un moyen d'"Afficher ses racines", lit-on.

Bravo. Très, très bien. Belle manière d'anticiper (en avril 2009), par une mesure administrative déroutante à tous points de vue, les sales manoeuvres du "Débat sur l'identité nationale" (d'octobre 2009) qui n'en finit pas de nous faire des noeuds dans la tête.


Comment un numéro de département pourrait-il afficher à lui seul mes racines ? - "Racines" au pluriel, notez bien : parce que dans l'attente d'une mesure de modernisation qui ne saurait tarder à germer dans l'esprit de grands serviteurs de l'État, la langue française ne permet pas de dire que "je suis fier de ma racine". Le mot racine, quand il s'applique à décrire l'histoire menant à l'existence d'un sujet donné, ne marche qu'au pluriel. "Je suis fier" ou "je suis en quête de mes racines".

Je le précise parce que le contenu et l'esprit du Débat sur l'identité nationale ont tendu à occulter le fait que l'identité est elle aussi, par définition, plurielle.

 

Quand l'identité objective se noie, l'identité subjective perd les pédales


La diffusion des nouvelles plaques montre donc bien la direction prise par une certaine idée du progrès, de la modernité :

- d'abord, l'idée que le progrès n'aurait pas besoin d'ancrer l'identité d'une chose et de l'individu qui lui est rattaché à un petit ensemble singulier. La voiture d'aujourd'hui est perdue dans la masse immense du parc automobile français, elle arrive d'un lieu non-déterminé.

Je relève la même anonymisation dans les nouveaux numéros de téléphone, les portables en 06 mais surtout les fixes en 09. Alors que les opérateurs permettent de transférer l'ancien numéro de fixe avec son identifiant géographique, j'ai l'impression que la majorité des acheteurs de "box" permettant avec un seul abonnement de se connecter à plusieurs réseaux (téléphone+internet+TV) sacrifient sans réfléchir leur "01", "05, "02" pour endosser le numéro de la modernité : 09. Dans ces conditions, parlons tous anglais ou esperanto et gommons bien soigneusement ces vilains petits détails qui nous rattachent à une bête réalité matérielle : là, j'appelle quelqu'un qui se trouve à Saint-Jean-de-Bigorre, puis un autre à Ensisheim. C'est pas très important mais c'est du réel ! Et ça m'intéresse donc autant que l'identité virtuelle que nous essayons de nous construire.

- virtuel : d'un côté il y a donc des pouvoirs et une opinion qui s'indignent quand des personnes résidant en France affichent sur leur balcon ou devant leur mairie un drapeau "étranger". Ou mettons plutôt, au hasard, algérien (ce blogueur ayant attiré mon attention sur le fait qu'il y a quand même des signes "étrangers" qui heurtent moins les sensibilités que d'autres). Et de l'autre, nous voilà tous encouragés, nous automobilistes de France, à nous coller aux fesses très officiellement un petit macaron sentimental. À condition de rester dans les limites de l'acceptable - ou du déraisonnable, au choix : l'affinité est priée de se limiter à un seul de la centaine de départements français, en faisant semblant de ne pas voir le reste du monde à nos portes.

Au moins on sort de l'anonymat, manière de reconnaître qu'une appartenance un petit peu limitée a encore un sens pour l'identité d'un individu. C'est bien. Mais dans quelles conditions : cela revient ni plus ni moins à donner une caution administrative au chauvinisme."Chauvinisme" désignant grosso modo un communautarisme qui glorifierait l'appartenance à la France.

Loin de moi l'idée de me scandaliser de ce mot de "communautarisme". Le communautaire fait partie de la vie, de l'identité. Je pense cependant qu'il devient étouffant, voire dangereux pour soi-même et pour les autres, quand il se traduit par un rejet de toute autre appartenance : l'idée que de se mêler à d'autres communautés, et l'idée surtout que l'on ne peut appartenir qu'à une seule communauté et que la reconnaissance que l'on a d'autres liens à d'autres communautés est une trahison "des siens". Le numéro de département ou de téléphone déterminé mécaniquement en fonction du lieu de résidence avait cette fonction-là : il n'enferme pas l'individu dans une identité fermée, il se contente d'exprimer une réalité qui n'a jamais empêché de se coller d'autres signes d'appartenance de son choix.

On avait le droit d'être fier de ce numéro, ou de tout faire pour montrer son rejet, et aussi d'y être indifférent : dans les trois cas, il y a une réflexion à plusieurs dimensions sur laquelle on pouvait revenir. Dire un jour : "ouais, j'habite à Paris et qu'est-ce-qu'ils sont cons ces Parisiens". Et le lendemain : "Ouais je suis parisien et je t'emmerde." Avec mon préféré : "J'habite à Paris, c'est vrai, c'est un coin que je connais bien. Mais j'aime pas tout à Paris, faut pas déconner." Quand on a décidé de faire graver le numéro d'un département précis sur sa plaque officielle, on devient lié à une appartenance, une seule, qui du coup implique qu'on a décidé de ne pas se reconnaître dans les autres. J'ai une partie de ma famille ici ; une autre ici ; je passe du temps dans ce coin et je m'y sens bien ; et puis il y a aussi mon mari qui est attaché à son propre département ; bon, je choisis l'Allier et je vais devoir la défendre, cette appartenance.

 

Anonyme d'abord. Communautariste ensuite pour essayer de récupérer des bribes d'identité. Et demain, intégriste ?

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14 février 2010 7 14 /02 /février /2010 21:15
Si j'écris "Nique la polémique!", je parais grossière.pointsdex.jpg
Pourtant "nique" m'arrache bien moins les oreilles que toutes ces "polémiques" dont retentissent les médias français depuis plusieurs années.

Le mot polémique dérive du grec polemos qui signifie guerre : le terme est fort.
Et si je le prends par ce bout-là, j'en viens à me demander si tous les sujets auxquels on colle le label "Polémique" du jour, de la semaine ou de l'année valent bien une guerre...

Les Belges ont déjà joué cette comédie-là l'an dernier. Pour l'instant, c'est bien la seule affaire qui ne semble pas menacer réellement l'équilibre du pays.
Merci à cette grande cité du Nord ouvrier d'alimenter avec assiduité la chronique de la vie musulmane en France. Roubaix passait déjà à la fin du XXème siècle pour une conquête islamique. La défaite de la gastronomie "traditionnelle" qui s'y joue aujourd'hui donne enfin de vraies raisons d'avoir peur.
  • Polémique !! Je n'ai pas pu entrer dans un bar gay car "les femmes sont interdites à l'intérieur"
Ah non, cette guerre-là n'aura pas lieu. C'est vexant, certes. J'aurais peut-être même pu crier à la discrimination.
Mais je dois avouer que je n'ai pas eu cette présence d'esprit sur le coup. Et à tête reposée, je suis contente d'avoir poursuivi mon chemin sans polémiquer ni insulter personne.
Peu m'importe en effet de savoir ce que la loi dit à ce sujet, et si ce bar dispose d'une autorisation spéciale pour refuser des clients (un club en a le droit, par exemple). Quand je suis chez moi, j'aime choisir les personnes auxquelles j'ouvre ma porte ou non. Alors si je montais un bar destiné à être d'abord un lieu de convivialité et non une simple entreprise commerciale, j'apprécierais qu'on respecte mon choix d'accueillir une clientèle particulière. C'est une règle comme une autre : difficile à accepter ou à comprendre parfois, mais légitime.

La polémique se moque bien de ce genre de considérations philosophiques. Mon exclusion d'un bar gay pourrait sans doute faire parler. Parce qu'elle correspond à quelques-uns des principes observables dans les deux premières "polémiques".
Certes, il n'y est pas question d'islam, sujet très prisé. Mais:
1) j'aurais pu brandir la discrimination: trouver un sujet porteur, c'est important.
2) pour le sujet porteur, il est opportun d'oser une provocation concernant une minorité en train de faire valoir ses droits contre les préjugés et l'oppression: ou-ah, c'est tellement politiquement incorrect de dénoncer les "abus" de musulmans, d'homosexuels... Comme le polémiste sait parler beaucoup, beaucoup, sans jamais tomber dans le piège de la nuance, ça va cogner.
3) il faut aussi penser qu'une bonne polémique doit être récurrente. Si elle a pris une fois au moins, les esprits sont prêts. Elle peut repartir. Et je n'ai pas été longue à trouver au moins un exemple d'une Canadienne qui est allée jusqu'à porter plainte pour "l'humiliation" subie à la terrasse d'un bar gay...

La plainte est la suite presque logique de la polémique. Voyez comment réagit le mouvement Ni Pute Ni Soumise. La polémique finit par retrouver son sens étymologique, même voire surtout sur les sujets les plus futiles.

Comme si la démocratie avait "besoin" de jouer à la guerre, frustrée par la paix qui prévaut en France depuis des décennies. Il me semble que nous devrions au contraire retrouver la mesure des choses en utilisant des termes plus appropriés.
  • Deux camps s'opposent sur un sujet complexe ? C'est un débat, pas une polémique. 
Pas besoin de jouer à la guerre, au contraire : la guerre détruit tout, elle appelle à se laisser aveugler par la haine pour mieux détruire l'ennemi. Alors que les hommes politiques, ceux qui se présentent aux élections et siègent dans des assemblées de la République en particulier, sont censés croire aux vertus du dialogue, du respect mutuel, du compromis.
Préférer la polémique au débat,  c'est rentrer ni plus ni moins dans une logique dictatoriale où seule la raison du plus fort a droit de cité.
  • Un événement grave suscite l'émotion générale ? C'est un scandale, pas une polémique.
Seuls de puissants manipulateurs parviendront à nous faire croire qu'on peut "débattre" ou "polémiquer" :
- du montant des notes de frais (et du bilan carbone !) de l'Elysée ;
- du fait qu'un grand patron dirige simultanément une entreprise privée et une entreprise publique ;
- ou de la signification de certaines réflexions sur les immigrés, juifs, musulmans et autres Français d'origine étrangère.
Parce qu'objectivement, il arrive un moment où toute l'opinion sait que quelque chose ne tourne pas rond. Il est donc inconcevable de voir que les médias, contre toute évidence et dans un "effort d'objectivité" clairement hypocrite, continuent à tourner autour du pot. Si bien que les personnes censées défendre l'opinion générale finissent elles-mêmes par s'embourber dans leur démonstration.
Quand le scandale se métamorphose en pseudo-polémique, le sens de ce que dit chaque camp n'importe plus. On compte les points pour l'amour de l'art, en se disant que cet ignoble porte-parole UMP dit vraiment des insanités, mais qu'il les défend mieux que ce lamentable porte-parole PS qui ne sait que s'opposer sans jamais annoncer ce que son parti fera demain pour arranger tout cela...
Il me semble qu'avec un scandale, tout est plus clair, plus propre. Ceux qui se sentent concernés savent que les paroles ne suffisent pas. Une seule solution : agir, se dresser pour faire connaître le scandale et le faire cesser. Peut-être que le scandale continuera ou recommencera. Mais il permet d'avoir une idée de qui a raison, et qui a tort.

Avec la polémique, allez savoir ! Les médias qui la font vivre (et qu'elle fait vivre) se garderont bien de trancher.
Elle fait de si belles images à la Une, comme la guerre, cette boucherie absurde de la polémique.
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11 janvier 2010 1 11 /01 /janvier /2010 22:37
Depuis quelques semaines, Eric Woerth est particulièrement soigné par Le Canard enchaîné.
Les coin-coin les plus sonores (à mon avis) concernent la double casquette de l'homme politique. D'ailleurs, l'hebdomadaire satirique s'entête à recouvrir de cette coiffe toute nouvelle allusion à Eric Woerth.

Voir, par exemple, l'édition du 6 janvier 2010 :

Woerth-Canard-060109Eric Woerth inaugure l'année en meilleure place de la page la plus lue (la page 2) du Canard. Bravo !
L'ascension a été rapide, mais riche en rebondissements. Je cite en effet de mémoire les "dossiers" ouverts récemment sur son compte :

- le fait que M. Woerth occupe simultanement les fonctions de ministre du Budget (et des Comptes publics, et de la Fonction publique, et de la Réforme de l'Etat) et de trésorier du parti majoritaire ;
- les prévisions opportunément élastiques de ses services à Bercy (ci-contre) ;
- la mutation d'un fonctionnaire coupable d'avoir, un soir, laissé son fils à la porte du logement de fonction qu'il occupe à Bercy.

Tout cela a été développé non pas en 3 simples articles, mais au fil d'une série comprenant plusieurs brèves et allusions, une enquête, un portrait éclaboussant au passage Madame Woerth...
Or l'obstination du Canard ne doit jamais rien au hasard. Cette accumulation fait penser que l'hebdomadaire a une dent contre Woerth, et chercherait à le déstabiliser.

La tâche est d'autant plus tentante que Monsieur Woerth ne se prive pas d'essayer de se faire mousser de son côté. Mais la rocambolesque histoire des 3000 fraudeurs qu'il se faisait fort de débusquer au fond de leurs réserves suisses ne peut pas expliquer, à elle seule, l'intérêt prononcé du Canard enchaîné pour une lumière parmi d'autres du Gouvernement actuel. Alors :

Est-ce à cause de scandales à venir, ou d'ores et déjà couverts par le très (trop) bien placé trésorier de l'UMP? Est-ce pour pousser ce dernier à la faute ? Pour égratigner son image de premier de la classe ? Dans l'espoir d'atteindre la machine UMP ou d'autres personnalités à travers à lui...?

... En fait, je ne saurai le "pourquoi" de tout ça que si la manoeuvre en cours parvient à son terme. Ce qui n'a rien d'évident.
Car, certes, les attaques ciblées contre la modeste personne d'Eric Woerth sont assez frontales et argumentées. Mais elles ne contiennent pour l'instant rien d'assez décisif pour tenir d'elles-mêmes.
Elles s'apparentent donc davantage à des signaux adressés aux initiés des mondes politiques et médiatiques. Des "initiés" qui :
- sont "invités" à s'emparer du cas Woerth sur les faits déjà exposés ;
- ou bien sont prévenus de l'imminence de révélations de plus grande ampleur ;
- mais qui peuvent aussi laisser Le Canard le bec dans l'eau si la sauce ne prend pas !
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10 janvier 2010 7 10 /01 /janvier /2010 19:23
Devinette :
Un couple de Parisiens jeunes, beaux et modernes des années 1980 se promène en amoureux... Où va-t-il ?

Réponse :
Ici...
Les_Halles-Porte_Lescot-Moi_voilouir_toi.jpg

C'est le film Moi vouloir toi (Patrick Dewolf, France, 1985) qui m'a rappelé les moeurs de ces temps heureux.
Et l'insertion de ce plan au milieu de la balade romantique de Patrick (Gérard Lanvin) et Alice (Jennifer, qui était apparemment aussi une star de la chanson) m'a fait tomber de ma chaise. Les choses ont quand même changé en 15 ans.
Pour ceux qui ne croiraient pas que ce film met en scène la "modernité" de l'époque, voici un petit rappel des faits :
- Patrick, le héros, est l'animateur des matinales de NRJ. Donc il parle fort, il est viril. Il a aussi un côté rétro avec sa Harley Davidson fétiche et ses petites manies... Oui, l'homme moderne du cinéma français est comme ça, dans les années 80 : il est costaud, mais il doit quand même s'accrocher pour tenir le coup contre l'adversité en général, et en particulier contre la femme moderne qui lui en fait voir de toutes les couleurs.
- la femme moderne c'est Alice, l'héroïne : elle est directrice artistique d'un groupe de rock. Elle a bossé comme une dingue pour s'en sortir, et elle continue car elle tient farouchement à son indépendance. Elle parvient au passage à épuiser le pauvre Patrick en passant ses nuits en club, et en le remettant à sa place dès qu'il fait un pas de travers. Du genre: "Ouais, tu veux m'épouser parce que t'as peur de finir seul. Mais tu vois, pour préserver notre amour, je préfère qu'on reste libres."

Voilà, c'est maintenant démontré : Alice et Patrick ne sont pas des ringards.
Pourquoi j'insiste? Parce que je ne m'attendais pas à voir une publicité pour les Halles se glisser au milieu d'une conversation entre ces amants rock et tendresl. Surprise, abasourdie, ça m'a fait monter un gros coup d'aigreur sur le destin de ce lieu.
Comme tout le monde, je pense, j'ai fini par m'habituer au Forum des Halles. C'est un quartier comme un autre, qui a juste la malchance d'être très voyant parce qu'il est en plein milieu de Paris. Mais bon, tellement voyant que j'y passe sans faire attention.
L'apparition de son logo façon "années 80" m'a rappelé que les Halles sont aussi un symbole de tous les aménageurs fous qui se sont succédés à Paris depuis des décennies. Regardez l'image à nouveau : Les Halles est écrit "comme à la main", avec en plus une déformation de chaque mot qui fait penser au mouvement, à la décontraction, voire peut-être à l'esquisse d'un coeur.
Finalement oui, si je me replace dans le contexte, ce logo devait être perçu comme un symbole de modernité à l'époque du film.

Et quelle modernité !
Je suis trop jeune pour pleurer sur l'ancien carreau des Halles, ses pavillons Baltard, ses troquets, ses marchands des quatre-saisons et ses bouchers... Mais je suis déjà assez vieille pour savoir ce qui était en train de disparaître en 1985, au détour d'un gentil film romantique.
Oh, l'évolution a pris du temps. Si j'en crois l'historique des Halles de Paris, le désir de faire table rase du passé commence bien avant l'inauguration du "centre commercial et de loisirs" en 1979 - un projet qui est d'ailleurs né dans la douleur. Mais c'est pour cela que le clin d'oeil qu'y fait le réalisateur de Moi vouloir toi n'est pas anodin : il ne parle pas que de l'architecture d'un coin de Paris, mais d'une évolution sociale qu'on peut voir comme un progrès... ou non. En résumé:
- Les Halles ancienne version, c'était le temple du commerce. Et j'aime le commerce qui implique l'échange, qui implique une relation d'égal à égal entre le marchand et le client.
- Les Halles "modernes" sont devenues un temple de la consommation. Et même si je suis consommatrice, je ne trouve pas ce statut très valorisant: le consommateur, c'est un être qu'on gave, c'est un être dont on sait que le but n'est pas de manger, de boire, de s'équiper, de s'habiller - il a déjà largement de quoi pourvoir à ces besoins primaires - mais de consommer. Ce qu'on lui vend, c'est le superflu: l'emballage, le gadget de fidélité, la promesse de faire sourire la caissière et de ne pas le faire attendre, des innovations à n'en plus finir pour qu'il soit sûr de ne jamais acheter deux fois la même chose...

Voilà pourquoi il n'est pas incongru, dans Moi vouloir toi, d'emmener deux amoureux se promener au Centre commercial le plus moderne de Paris. Ils sont passifs, ils n'ont rien de spécial à faire: ils n'ont qu'à aller aux Halles ! Alors que 50 ans plus tôt, un film prenant les Halles pour décor montrait au contraire des personnages en action, des lutteurs pleinement engagés dans la vie ou la survie.
Vous trouvez la nuance entre commerce et consommation abstraite ? Je la ressens très vite quand j'entre dans un magasin. J'aime qu'un commerçant ait un avis sur ses produits. J'aime qu'il bouscule mes goûts. Je suis prête à payer cher pour cela, et à revenir, et à ramener du monde : la relation humaine qui s'établit au moment de l'achat va donner une valeur supplémentaire à ce dernier. A l'inverse, je suis prête à me passer de l'objet donc j'ai le plus besoin si le vendeur m'a traitée comme s'il s'imaginait que je n'ai pas le choix, comme si je n'avais qu'à payer et partir.

Attention : il n'y a pas d'âge pour être mauvais commerçant. J'entre parfois dans des boutiques très "vieille France" où tout respire l'amour du commerce et du travail bien fait et où, malgré ou à cause de cela, les maîtres des lieux ont la bêtise d'accueillir le client inconnu comme un intrus. Tant mieux pour eux : je ne les dérangerai plus.
Mais c'est vrai que l'inaptitude au commerce me frappe particulièrement chez les plus jeunes. Il est visible que beaucoup s'embauchent dans ce secteur comme autrefois on entrait à l'usine : parce que c'est un secteur en pleine expansion qui recrute à tour de bras. Je regrette très égoïstement d'avoir à subir leur ennui, voire le mépris qu'ils affichent pour cacher leur déplaisir de se retrouver au service d'autrui.
Les seuls qui s'y retrouvent sont peut-être ceux qui ont autant de mépris pour le commerce que pour la consommation. Je n'y arrive pas, car j'ai toujours eu beaucoup de plaisir à essayer d'accueillir, écouter et satisfaire n'importe qui ; un effort qui me permet de remettre aussi n'importe qui à sa place quand il en vient à croire qu'un commerçant serviable peut être traité comme une serpillière...

Moi vouloir toi commence par un joli chassé-croisé sentimental dans l'effervescence des années 1980. Et puis la manière dont Patrick et Alice apprennent à se construire une belle histoire d'amour finit par ne plus intéresser qu'eux-mêmes.
Au Forum des Halles, même histoire: la satisfaction des besoins de l'Homme moderne a été trop pensée et repensée, au lieu de continuer à s'épanouir à son rythme et avec ses défauts. L'hypocrisie spontanée qui fait tout le charme du commerce a été remplacée par la "libération" du consommateur : plus besoin de réfléchir, plus besoin de prendre son temps, plus besoin de se déplacer!
Désormais, le consommateur se laisse guider par l'enchêvetrement de couloirs, d'arbres et de fontaines qui dissimulent le vilain appât du gain du commerçant. Et après coup, s'il se rend compte de l'absurdité de son geste, il se console en se rappelant que "le consommateur a des droits!" On réfléchit, on se plaint, on négocie, mais après-coup.

La belle affaire, des droits ! Avec les droits, il y a toujours des devoirs, et même des conditions à respecter pour faire valoir ces droits : avoir des droits, c'est déjà être en position d'infériorité et de dépendance. La belle Alice aussi revendique "ses droits" de femme libérée face à Gérard Lanvin. Cela leur rend la vie un peu plus compliquée à tous les deux, et trente ans plus tard le Paysage Audiovisuel Français n'en finit pas de se moquer des névroses de "la femme libérée" et de son homme de moins en moins homme.
Non, vraiment, est-ce un progrès de voir la société obligée de se préoccuper de "défense du consommateur"? Ce serait plutôt la preuve que le consommateur est désormais aussi mal traité que les femmes - justement, les travailleurs, les enfants et autres espèces menacées à travers le monde...
Je préfèrerais qu'on se rappelle que "le client est roi" : il a peut-être besoin après tout, pour être satisfait, d'imposer au commerçant inlassablement patient et souriant ses hésitations, ses pertes de temps, ses caprices, son besoin d'être rassuré... Aujourd'hui, ce principe-clé du plus petit commerçant de quartier passe pour un luxe désuet, un bonbon qu'on accepte avec beaucoup d'étonnement. La norme serait plutôt cette boulangère d'une grande enseigne parisienne qui m'engueule presque parce qu'elle n'a pas le produit que je demande, puis qui met dix minutes à me rendre la monnaie parce qu'elle commente son planning avec une collègue, et qui me laisse partir sans m'avoir jeté un seul regard. Que je me sens con-sommatrice dans ces cas-là...

Avant de refermer cet arrêt sur image, une remarque. Ce n'est pas uniquement à cause de ma confusion mentale que cette diatribe, peut-être, manque de clarté. J'accuse encore une fois la modernité, qui prend un malin plaisir à jouer sur les mots !
C'est elle qui parle de "consomm-acteur" pour flatter le client, ou de "centres commerciaux" à propos d'infrastructures qui misent plus sur des "stratégies marketing" que sur le sens du commerce. Et c'est la modernité enfin qui a choisi de garder le nom des Halles, pour que le promeneur puisse plus facilement prendre l'agitation du Forum pour le dynamisme d'antan.... jusqu'à ce que de nouveaux aménageurs fous décrètent que cette modernité-là ne fut que gâchis et déclin continu, et qu'il est temps de moderniser tout cela.
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